mercredi 30 septembre 2009

Hécatombe en Guinée et la langue de bois du chef de la junte Dadis Camara.

«L'armée est hors de contrôle», assure le capitaine Moussa Dadis Camara, pour expliquer la répression sanglante. Il reste cependant très menaçant envers l'opposition.

Le chef de la junte au pouvoir en Guinée se dédouane. Il n'est pas responsable de la répression sanglante menée par les forces de l'ordre contre les manifestants, qui s'opposaient lundi à sa future candidature à l'élection présidentielle de janvier. «L'événement m'a débordé. Cette armée, je ne contrôle pas toutes ses activités […]. Dire que je contrôle cette armée, ce serait de la démagogie», a affirmé mercredi matin sur Europe 1 le capitaine Moussa Dadis Camara. «J'ai hérité d'un héritage d'un demi-siècle, une armée où le caporal peut dire «merde» à un colonel, à un général», a-t-il insisté.

Ces dénégations sonnent comme une réponse à la condamnation internationale unanime après la succession d'actes barbares ces derniers jours. Ancienne puissance coloniale, la France a suspendu sa coopération militaire et décidé mardi de réexaminer l'ensemble de son aide bilatérale, qualifiant la répression de «sauvage». A sa demande, l'UE doit se réunir mercredi «pour examiner les mesures complémentaires […] qui pourraient être prises rapidement». L'Europe avait déjà décidé fin juillet de placer la Guinée sous surveillance pendant deux ans et de prolonger le gel de son aide au développement, exigeant un retour à l'Etat de droit, après le coup d'Etat qui avait suivi la mort du président Lansana Conté en décembre dernier.


Disparition de corps

S'exprimant mardi soir à la télévision nationale, le chef de la junte avait déjà tenté d'afficher sa compassion avec les victimes dans son pays, déclarant mercredi et jeudi «journées de deuil national». Il avait également invité les partis politiques, médias et organisations religieuses au calme, après s'être rendu dans deux hôpitaux pour rencontrer de nombreux blessés.

Ces quelques signes d'apaisement ne suffisent cependant pas à masquer la colère du chef de la junte contre l'opposition. Selon le capitaine Moussa Dadis Camara, ce sont des «assoiffés de pouvoir» qui ont provoqué la manifestation de lundi. «Ils distribuent de l'argent aux enfants pour les pousser à la révolte. Ce qu'ils ont fait était prémédité», a-t-il assuré. Dès lors, tout nouveau regroupement, «de quelque nature que ce soit à caractère subversif» a été interdit. Et les «fauteurs de troubles et les commanditaires seront sévèrement punis».

Pour l'heure, le bilan de ces deux jours de répression reste flou. Le ministère de l'Intérieur ne fait état que de 57 morts, dont 4 par balles perdues. Mais selon l'organisation guinéenne de défense des droits de l'Homme, la violente répression a fait plus de 150 morts et 1.200 blessés. Mardi, de nouvelles scènes d'exactions ont été constatées dans la capitale Conakry, entraînant la mort de trois jeunes Guinéens. Et les ONG faisaient toujours état de disparition de corps ou d'enlèvements de blessés et de femmes violées par les militaires directement dans les hôpitaux. Officiellement, il s'agit de déplacements pour des raisons sanitaires.

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